Le vernis était devenu opaque avec le temps, et cette opacité jaunissait l'œuvre, camoufflant l'opposition entre la couleur diaphane de la peau, le blanc éclatant de la coiffe, et les couleurs du paysage. Quant au cadre, il avait également perdu son éclat.
Réalisée au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF), dans les ateliers de Versailles, l'intervention a donc permis de faire disparaître l'aspect jaunâtre, et de redonner de la profondeur à l'oeuvre. Les différents plans sont dorénavant plus distinctes, et la figure se détache davantage du paysage. Elle a retrouvé la fraîcheur des couleurs originales, la précision de la touche et son côté graphique, très dessiné, qui témoigne de la connaissance d'Ingres des oeuvres des grands maîtres italiens tels De Vinci ou Raphaël.
Regards d'artistes
Cette pièce maîtresse des collections du musée avait été acquise par Léon Bonnat à la fin du XIXe siècle. Le peintre collectionneur portait en effet un grand intérêt au travail de Jean-Dominique Ingres, élève de Jean-Louis David, et lauréat en peinture du Grand Prix de Rome en 1801. En témoigne le fonds de dessin de près de cent feuilles, qu'il avait également acquis. La Baigneuse fait partie de son legs aux musées nationaux en 1922, pour qu'elle rejoigne, comme les autres pièces de sa collection, les salles du musée Bonnat. Elle est la première des Baigneuses qui contribueront à la renommée du Maître. On y devine déjà La Baigneuse de Valpinçon, la Grande Odalisque (Louvre) ou encore le Bain Turc, tous trois conservés au musée du Louvre..
À la réouverture du musée, La Baigneuse sera présentée en majesté dans une salle consacrée à l'Europe au tournant du XIXe siècle. Confrontée à plusieurs portraits anglais, espagnols et français, elle témoigne de la manière dont les artistes se sont emparés des changements majeurs de la période. Dans cette salle de grands chefs-d'oeuvre, Ingres dialoguera avec Francisco de Goya et plusieurs grands artistes britanniques tels que Thomas Lawrence, Joshua Reynolds ou John Constable.
Les partenaires de la restauration de La Baigneuse sont le C2RMF (ateliers de Versailles), ainsi que l'État par l'intermédiaire du Service des Musées de France (SMF, Paris) et de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC, Nouvelle Aquitaine).